Où j’ai laissé mon âme – Jérôme Ferrari (2014)

Au cœur de l’Algérie, au milieu d’une guerre que l’on connaît tous, nous sommes spectateurs de l’horreur, des violences, des justices sanglantes et des tortures punitives que s’infligent les hommes.

Le lieutenant Andreani se remémore son supérieur, le capitaine André Degorce. Seul, Degorce a survécu à la guerre et aux camps de concentrations. Ensemble, ils ont été faits prisonniers pendant la guerre d’Indochine. Jamais le capitaine Degorce ne montra un signe de faiblesse. Il releva toujours Andreani, lui donna la moitié de sa ration de riz et d’espoir. Il a déjà traversé l’enfer plus d’une fois. Aucun démon ne semblait plus pouvoir l’effrayer. Degorce est toujours puissant, résistant, fort, impérissable. Jusqu’au moment où…

Arrivé au milieu du conflit nord-africain, le lieutenant Andreani s’adapte et endosse pleinement le rôle du bourreau. Mais Le capitaine Degorce n’en peut plus. Il n’arrive plus à écrire à sa famille, il ne parle plus le langage de l’affection. S’ils savaient ce qu’il faisait ici…
Il se lie alors d’amitié avec Tahar, un prisonnier de la résistance.

Un roman court, mais d’une intensité rare. Je l’avais lancé en version audio pour un long trajet en voiture, et j’ai été immédiatement hypnotisé par le rythme de narration, le souffle des mots, l’émotion de la voix.

Le lieutenant Andreani parle à son capitaine. On le sent désolé de voir cet homme invulnérable se consommer dans le doute et la culpabilité face à l’enfer qui s’installe dans le pays et dont il est l’un des acteurs principaux. Les ténèbres le pénètrent pas à pas et finissent par lui noircir l’âme.

Un roman puissant. Un roman qui m’a fait m’assoir. Un roman qui m’a forcé à lire chaque mot en l’articulant, à adopter le rythme de la phrase, à respecter le silence des points. Un roman que j’ai lu lentement sans vouloir en perdre une seule miette. Un roman qui m’a bouleversé et qui, peut-être, vous touchera autant que moi.

Éditions Babel
154 pages