Soixante-neuf tiroirs – Gorran Petrović (2021)
Certains livres sont lus, puis oubliés. D’autres pourtant, traversent le temps et passant de mains en mains, déchiffrés par les yeux de dizaines de lecteurs. Ce livre est l’histoire de l’un deux, intitulé « Ma Fondation », qui tombe entre les mains d’Adam, jeune étudiant en lettre mandaté pour lui apporter des corrections.
Un mandat comme un autre, parfait pour mettre un peu de beurre dans les épinards de ce jeune homme sans le sou. C’est en commençant sa lecture qu’il se rend compte d’un fait étrange. Il rentre littéralement dans le livre. Il peut voir les champs de blés qui y sont décrits, sentir le vent dans ses cheveux, goûter aux mets sur les tables. Plus étonnant encore, il croise les autres personnes qui lisent le même livre en même temps. Il peut leur parler comme dans la vraie vie.
Voilà le fait autour duquel sera basé l’entièreté du livre : les lecteurs du même ouvrage, qui lisent les mêmes passages aux mêmes moments, peuvent se voir, se rencontrer, se parler. Des amours impossibles naissent, mais c’est aussi le théâtre pour des missions d’espionnage ou de trahison.
Un roman qui s’adresse à tous les amoureux de la littérature. Une intrigue épatante mêlée à un éloge de l’art littéraires, des personnages multiples et complexes. Une réflexion sur le pouvoir des mots et l’évasion totale qu’ils nous promettent. Bref, un régal que je recommande vivement.
Il existe trois sortes de lecteurs, selon la classification de Goethe, ce grand pointilleux. La première prend du plaisir sans analyser. La troisième analyse sans prendre du plaisir. Et, entre deux, il y a celle qui analyse tout en prenant du plaisir et prend du plaisir tout en analysant. C’est cette dernière qui, en fait, recrée l’œuvre.
Éditions Zulma
361 pages
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