Liv Maria – Julia Kerninon (2020)

Liv Maria change de peau. Elle est d’abord la petite fille unique de ses parents sur une petite île perdue au milieu des vagues. Elle vit de fruits de mer et de sel. Loin des tumultes, la vie est douce. Puis elle part à Berlin pour découvrir le monde et devient l’amante d’un professeur : un amour incandescent, tendre et formateur. Elle sera ensuite la gérante d’un bed and breakfast, avant de partir en voyage en Amérique du sud. Après des semaines de voyages, de petits jobs et de cueillettes de fruits, elle devient gérante d’un ranch. Plus tard, elle rencontre Flynn, et rentre en Irlande et s’établit, maintenant mère de famille.

Un destin chargé en somme. Mais qui est-elle vraiment après tous ces changements ? Peut-elle vraiment s’enfermer dans un seul rôle pour y rester à jamais ? Sans compter qu’elle cache un terrible secret. Comment réussir à en parler ? Faut-il vraiment l’évoquer ? Elle sent qu’elle ne tiendra plus très longtemps.

Encore un excellent portrait de femme brossé par la talentueuse Julia Kerninon.  Les personnages sont bien réels : on sent leurs tracas, leurs douleurs et leurs joies, tant bien que le lecteur ne peut qu’être empli de compassion. Ne sommes-nous tous pas victime de cette quête d’identité ? Le roman n’est pas sans rappeler une tragédie grecque : la fatalité des évènements semble insurmontable. Kerninon sait aussi infuser des petits jets d’érudition, notamment littéraire mais aussi étymologique, sans que ce soit trop lourd, toujours dans une bonne mesure.

En bref, un roman que j’ai lu en une fois, tant j’ai été accroché par le destin atypique de Liv Maria Christensen. Une réflexion sur l’identité et sur la subjectivité des expériences : nous vivons uniquement ce que nous croyons vivre, toute situation et évènement est subjectif et dépendant du narratif qu’on lui prête.

P.S. (Attention SPOILER) Pour ceux qui l’ont lu, je ne peux m’empêcher de tracer un parallèle avec la « Confession d’un enfant du siècle » de Musset : une trahison amoureuse, l’essai d’une autre vie, le retour à l’espoir de l’amour, pour finalement se rendre compte que rien n’a de sens. Juste une pensée !

Éditions l’Iconoclaste
271 pages