Les Discordances – Philippe Calleux (2021)

Pierre Gerson est un grand bourgeois juif, négociant de matières premières. Il est très bien connecté à Paris. Honoré et décoré pendant la grande guerre, il ne se soucie aucunement de son lien avec son pays où il se sent chez lui. Il a défendu la France avec son sang dans les tranchées, aucune chance qu’elle ne se retourne contre lui.

Mais son appartenance intrinsèque au peuple français est remise en question de manière de plus en plus appuyée, à mesure que les nazis gagnent du terrain en France et que le régime de Vichy commence à sévir. D’abord forcé d’abandonner son métier, il fuit la capitale avec sa famille pour aller au sud, le temps que la situation se calme.

Tout le monde lui dit de partir, de fuir pour les États-Unis, mais Pierre est convaincu que son érudition et ses hauts faits d’arme le protègeront. Puis les lois contre les juifs se multiplient, la rafle du Vel’ d’Hiv’ lance un courant d’air glacé sur le pays, les déportations deviennent quotidiennes. La question : est-ce que Pierre Gerson se réveillera à temps ?

Excellent premier roman de Philippe Calleux, inspiré de la vie de son grand-père. Comment accepter l’idée que notre propre pays nous rejette, alors que nous n’avons contribué qu’à sa défense et son développement ?

Comment abandonner ses amis, ses racines, sa culture et les mots de la langue française auxquels je suis tant attaché ? Pourquoi les Allemands s’en prendraient-ils à nous ? Oui, à nous ? Aucun de mes parents n’étaient pratiquant. (…) Mon attachement à la religion juive tient de la fidélité aux opprimés juifs de tous les temps, à la volonté de rester fidèle aux dreyfusards, à la fierté de s’opposer aux ligues d’extrême droite. Nous sommes des français parmi d’autres. Qui pourrait faire une différence ? Non, je ne veux pas quitter ma patrie, mon air, mon ciel.

Éditions Frison-Roche
199 pages