La peau et les os – George Hyvernaud (1949)

La peau et les os – George Hyvernaud (1949)

Ce livre est un vrai témoignage de George Hyvernaud. Né en 1902, professeur dans les écoles normales d’instituteurs, il a été mobilisé en 1939 et fût capturé peu de temps après en Allemagne. Officier, il est fait prisonnier et passe plusieurs années dans des conditions terribles.

George Hyvernaud nous raconte cette fenêtre hors du temps, ce chapitre qui à la fois ne fait pas vraiment partie de sa vie, mais qui en même temps, lui a paru durer une éternité. Bien sûr, il est conscient que son calvaire est bien léger face aux horreurs des camps de concentration. Mais il nous parle tout de même de l’ennui, de l’absence de sympathie des cadres allemands, des latrines nauséabondes, de la nourriture infecte, des stratégies de chacun pour ne pas devenir complétement fou.

Si l’horreur est intéressante, ce que j’ai personnellement trouvé le plus fascinant est le retour à la maison. Souvent glorifié et idéalisé tant dans la littérature que dans la tête du prisonnier, Hyvernaud semble presque déçu par la banalité des retrouvailles avec sa femmes, ses amis, son village. Il a vécu quelque chose d’exceptionnellement difficile et douloureux, mais cela ne rend pas sa vie plus palpitante ou appréciable. Plusieurs fois, il aimerait raconter la prison à ses proches, les coups de bâton, le béton glacé, ses compagnons de cellule, les corps enterrés par centaines, les prisonniers russes réduits à l’état de zombies, mais rien n’y fait, il n’y arrive pas.

Le monde qu’il a quitté n’est simplement pas compatible avec celui qu’il a quitté. Ils ne comprendraient pas. Personne ne pourrait comprendre. Cela paraitrait exagéré, irréel, impossible. On le prendrait peut-être même pour un fou. Non. Décidément, il fallait être là. Et faute de pouvoir les partager, certaines expériences resteront enfouies à jamais, à la frontière du cauchemar et de la réalité.


Éditions le Dilettante
158 pages