La compagnie des voyants – Mathieu Laine (2023)

Comme Rimbaud l’avançait, les grands romanciers ont la lucidité de « voyants ». Leurs regards – et donc, leurs romans – nous aide à voir plus loin, à mieux comprendre le monde.

C’est ce que démontre Mathieu Laine dans cet essai plein d’intelligence. À travers la lecture de 25 classiques de la littérature mondiale, il nous invite dans une réflexion en deux parties.

Tout d’abord, il veut nous mettre en garde face à nos « aveuglements », composés de nos « tentations autoritaires », de « nos servitudes volontaires et se « nos moralismes sclérosants. On trouvera bon nombre d’exemples dans les livres comme Lady L de Romain Gary, La Ferme des Animaux de George Orwell ou encore dans Vernon Subutex de Virginie Despentes.

Une fois nos aveuglements pris en compte, il nous propose de « recouvrir la vue » dans la seconde partie, aussi articulée en trois étapes : Parier sur l’humain, penser par soi-même et viser haut. Il tirera alors des exemples de l’Iliade, de Germinal ou encore des Mémoires d’Hadrien.

Un essai qui nous invite à arrêter notre course effrénée sans réflexion et à prendre le temps de lire. Car ce n’est que par la lecture que l’on s’émancipe véritablement, qu’on se donne le temps de questionner le monde, et peut-être, un jour, d’y trouver des éléments de réponse. À l’heure où les populismes grondent, où la liberté d’expression faiblit et la démocratie rentre dans sa période d’adolescence, il est capital que le citoyen lise les expériences de ses pères, pour ne pas tomber dans les mêmes travers qui ont, plus d’une fois, mis notre liberté et notre bonheur en péril.

La compagnie des voyants est un essai essentiel pour tout lecteur, et certainement encore plus essentiel pour les fous qui pratiquent l’abstinence. Il donnera des envies de romans aux premiers, et demandera ce que les autres peuvent bien avoir dans la tête.

Éditions Grasset
320 pages