La Chouette Aveugle – Sadegh Hedayât (1953)
Sadeq Hedayât est un auteur méconnu. À tort, car il est sans doute le meilleur écrivain iranien du 20ème siècle. Né à Téhéran en 1903, il se suicide à Paris en 1951. Après des études en France, qui ont bien occidentalisé son esprit, il n’a jamais pu se sentir à nouveau chez soi en Iran, et en même temps, n’a jamais été accepté en France non plus. On sent ce désespoir dans son œuvre, cette impression de rejet et de se sentir nulle part chez soi, comme un apatride. Hedayât était aussi traducteur et a notamment traduit une partie de l’œuvre de Kafka en perse.
Le désespoir de Hedayât ne m’avait jamais autant touché que dans la Chouette Aveugle. Si je devais le résumer rapidement, il se tient en 2 parties : un trip sous opium et un mariage raté.
La première partie nous plonge donc dans des brumes oniriques où il faut accepter d’oublier les règles usuelles de la réalité. Comme on nous le dit dans la préface, les effets de trouble et d’illusion sont voulus, il faut savoir se laisser porter.
La seconde partie est un mariage où la haine remplace l’amour. La solitude et le délaissement rongent le narrateur, qui n’a droit ni à l’amour, ni au contact physique de sa femme. Il reste spectateur tandis qu’elle le trompe et refuse qu’elle le touche. Dès la première nuit ensemble, il est forcé de dormir sur la terre battue dans le coin opposé de la pièce.
Vous l’aurez compris, ce n’est pas un roman joyeux. Cela dit, c’est une réelle aventure de la langue, le cri d’un écrivain en détresse qui nous quittera trop tôt. Pour une fois, je ne vous conseillerai ni de le lire, ni de ne pas le lire. Ouvrez-le quand vous serez prêt, si vous l’êtes un jour.
Éditions José Corti
196 pages
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