Azincourt par temps de pluie - Jean Teulé (2022)

Azincourt par temps de pluie - Jean Teulé (2022)

Azincourt, petit village français, tristement connu pour une bataille catastrophe pour le royaume. Les Anglais étaient en fuite, pressé d’atteindre Calais pour de là prendre le navire vers l’Angleterre. Ils n’étaient que quelques milliers. Mais pour leur plus grand désespoir, ils se font coincés en haut d’une colline par des dizaines de milliers de Français, prêt à en découdre. En plus de cet avantage numéraire fatal, les Français ont l’avantage d’êtres frais et dispos. On ne peut pas en dire autant des Anglais, qui en plus de subir un presque jeûne de 2 semaines, se sont fait foudroyés de dysenterie à cause de moules avariées. Les jeux sont faits. Du moins, c’est que tout le monde croit.

Victime de leur arrogance et esclaves de leurs règles de guerre surannées, les Français vont subir la défaite la plus terrible de leur histoire. Les nobles se battent pour être en première ligne, certains de leur victoire. Dans un élan de rage et de confiance, les Français dresse l’oriflamme de la mort, un étendard rouge à trois pointes frangées d’or qui annonce qu’une chose : qu’aucun Anglais ne sera fait prisonnier, tous périront par l’épée en ce jour. Pas de quartier, c’est une mise à mort.

Une pluie de plusieurs jours s’arrête enfin, la bataille peut enfin commencer. Mais c’est là que tout dérape. Les Français sont en bas de la colline, et gardent leur position, car charger en montée est contraire à tout principe de stratégie. Qu’à cela ne tienne, les Anglais avance, petit à petit, jusqu’à ce que les Français soient à la portée de leurs arcs longs. Ils tirent. Encore et encore. Des salves de milliers de flèches obscurcissent le ciel. À mesure qu’ils s’approchent, les tirs se font plus direct, avec la force de transpercer les armures.

Mais l’ennemi ne bouge pas. Pourquoi donc ? Simplement parce qu’il ne le peut pas. Les nobles français, prisonniers de leurs armures lourdes, sont pris dans la boue jusqu’aux genoux. Ils meurent debout tels des statues.

Les Français décident alors d’envoyer la cavalerie lourde sur les archers anglais pour faire taire la corde de leurs arcs une fois pour toutes. Mais grâce à l’usage de pieux, la charge est repoussée. La cavalerie tente une fuite de côté, mais son surpris par des archers anglais postés de par et d’autre des deux forêts qui cernent le champ de bataille. Les chevaux paniquent, et il ne reste plus qu’une direction à charger pour leur survie : les lignes françaises.

Voilà le début de ce qui est sans doute la plus grande hécatombe militaire de la Guerre de Cent Ans. Et bien au-delà de la valeur historique du texte, il faut aussi dire que c’est diablement drôle. Jean Teulé n’hésitait pas à parler comme les gens de l’époque, usant d’un humour qui n’est pas sans rappeler Rabelais.

Je ne peux que regretter que ce soit le dernier roman de cet écrivain aussi drôle qu’intelligent, qui était aussi habile avec sa plume que sur les plateaux télévisés où il était souvent invité. Je le regrette déjà et lui souhaite de reposer en paix, avec son nom inscrit dans la lignée des grands écrivains du début de notre siècle.


Éditions J’ai Lu
220 page